Le pacte d’associés est une convention extra-satutaire qui permet, en fonction des besoins de ses signataires, d’aménager discrètement les relations entre les associés, mais aussi par laquelle il est possible pour seulement certains associés de la société de s’engager. Un tel acte permet également de prévoir des engagements réciproques plus complexes, ou pour une durée limitée.
- Clauses entraînant la nullité du pacte
Certaines clauses sont susceptibles d’entraîner la nullité du pacte. Ainsi en est-il pour une clause constituant un pacte sur succession future. La Cour de cassation a été amenée à se prononcer à ce sujet dans une décision récente. Dans cette affaire, un père était signataire d’un pacte d’associés avec ses cinq enfants. L’objectif de ce pacte était d’anticiper les conséquences de la perte de la qualité d’associé par le père, afin que le groupe reste dans la famille.
En l’occurrence, le pacte prévoyait les modalités de remboursement du compte courant d'actionnaire du père lors de l'ouverture de sa succession. Il n’était pas question d’autres biens meubles ou immeubles. Il s’agissait d’anticiper la stratégie de gestion des héritiers lors du retrait des affaires du père. L’examen du pacte dans son ensemble a permis à la Cour d’appel d’estimer que cette clause n’était ni essentielle ni déterminante de l’acte.
Cette clause concernant la sortie du père de la société pouvait donc dans ce cas être valablement intégrée dans le pacte.
- Conditions de validité de certaines clauses du pacte
Certaines clauses sont en outre soumises à des conditions de validité spécifiques, telles les clauses de non-concurrence.
Dans une affaire récente soumise à l’appréciation de la Cour de cassation, la clause de non-concurrence d’un pacte d’associés stipulait que le mandataire social s’engageait, pendant toute la durée de sa présence au capital de la société ou de ses filiales, à ne pas occuper, en France ou à l'étranger directement ou indirectement, de fonctions rémunérées ou non, quelle qu'en soit la nature dans une société ayant une activité concurrente à celles exercées à ce jour ou qui seraient exercées par la société ou par ses filiales pendant ladite durée, ou ayant lien avec l'activité concurrente.
Le mandataire social formulait une demande indemnitaire au titre de cette clause de non-concurrence.
La Cour d’appel a estimé que le fait que cette clause soit insérée dans un pacte d’associés, et non dans un contrat de travail comme c'est souvent le cas en pratique, n'obligeait pas à ce que soit fixée une durée ni une limitation géographique.
Ce faisant, la Cour d’appel a violé le principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle.
Une clause de non-concurrence n'est valable qu'à condition d'être limitée dans le temps et dans l'espace et d'être proportionnée au regard de l'objet du contrat. Ces conditions de validité s'appliquent peu importe le contrat dans lequel cette clause est prévue, contrat de travail ou pacte d'associés.
Le pacte d’associés doit avoir une durée déterminée. En effet si le pacte est conclu pour une durée indéterminée chaque signataire est libre d’y mettre fin à tout moment sous réserve de respecter les règles régissant la résolution du contrat, par exemple le fait de respecter un délai raisonnable.
Dans la même affaire que celle évoquée dans le premier point concernant le père et ses cinq enfants associés, un article du pacte d'actionnaires prévoyait que le contrat est conclu pour la durée de la société, soit pour le temps restant à courir jusqu'à expiration des 99 années à compter de la date de son immatriculation au registre du commerce et des sociétés.
Au terme de cette première période, le pacte devait être automatiquement et tacitement renouvelé pour la nouvelle durée de la société éventuellement prorogée. A l'occasion de chaque renouvellement, toute partie pouvait dénoncer le pacte pour ce qui la concerne, en notifiant sa décision au moins six mois à l'avance aux autres parties. Selon un autre article, le pacte devait lier et bénéficier aux ayants droits de chacune des parties.
La Cour d’appel a considéré que la société ayant été immatriculée en 1969, la première période du pacte expirait en 2068, donc les descendants des parties ne pouvaient sortir du pacte qu’à un âge particulièrement avancé. L’arrêt en a déduit que la durée du pacte était excessive et a ouvert en conséquence aux partis la possibilité de résilier le pacte unilatéralement à tout moment.
La Cour de cassation considère qu’un pacte d’associés peut être conclu pour la durée de la société, sans que les parties puissent avoir la faculté de résilier. Il est donc possible de prévoir un pacte pour la durée de la société.
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(Cass. com., 30 mars 2022, n° 19-25.794 ; Cass. Civ. 1ère, 25 janv. 2023, n° 19-25.478)