Les effets du contrat à l’égard d’un prestataire tiers au contrat : impact de la clause limitative de responsabilité

La responsabilité d’un opérateur économique peut être engagée sur le fondement contractuel ou délictuel.

En présence d’un manquement à un contrat on parle de « responsabilité contractuelle », les clauses de ce dernier trouveront à s’appliquer, et notamment les éventuelles limitations de responsabilité ou réduction de délais de prescription.

A défaut de contrat, on parle de responsabilité délictuelle. Depuis longtemps la jurisprudence considère que le tiers auquel un manquement contractuel a causé un dommage peut invoquer ce manquement sur le terrain délictuel. Ce principe bénéficie au tiers, car il n’a pas besoin de démontrer une faute, il lui suffit d’établir le manquement contractuel.

La Cour de cassation a récemment pris position sur la question de l’opposabilité d’une clause limitative de responsabilité au tiers à un contrat. Cette question est extrêmement sensible, car à défaut d’opposabilité de cette clause limitative de responsabilité au tiers, cela signifie que ce dernier n’est pas soumis aux mêmes restrictions que le cocontractant, alors qu’il peut se prévaloir d’un manquement contractuel.

Dans le cadre du litige soumis à l’appréciation des juges, une société spécialisée dans la production de machines fabriquant des emballages a fait transporter plusieurs machines d’Italie en France. La manutention et le déchargement des machines à l’issue du transport ont été confiés à une troisième société prestataire.

Une machine a été endommagée par un salarié du prestataire en question.

Le contrat contenait une clause limitative de responsabilité, dont le prestataire s’est prévalu. La Cour d’appel a considéré que le prestataire qui avait endommagé la machine ne pouvait bénéficier de la clause limitative de responsabilité.

La Cour de cassation a affirmé pour la première fois dans cette décision de juillet 2024 :

  • que « le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage (Ass. plén., 6 octobre 2006, pourvoi n° 05-13.255, Bull. 2006, Ass. plén, n° 9) et que s'il établit un lien de causalité entre ce manquement contractuel et le dommage qu'il subit, il n'est pas tenu de démontrer une faute délictuelle ou quasi délictuelle distincte de ce manquement (Ass. plén. 13 janvier 2020, pourvoi n° 17-19.963, publié au bulletin)».
  • que « le tiers à un contrat qui invoque, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel qui lui a causé un dommage peut se voir opposer les conditions et limites de la responsabilité qui s'appliquent dans les relations entre les contractants».

Les tiers au contrat sont donc à présent sur un pied d’égalité avec les cocontractants, les restrictions contractuelles éventuelles sont également opposables au cocontractant ou au tiers. Les prévisions des cocontractants concernant les risques s’en trouvent sécurisées !

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(Cass. com., 3 juillet 2024, n°21-14.947, Publié au bulletin)

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