La paralysie des poursuites en procédure collective : une protection insuffisante pour les dirigeants poursuivis pour fraude

Une procédure collective s’ouvre par un jugement, qu’il s’agisse d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire. 

Ce jugement d’ouverture a pour conséquence immédiate d’interdire l'exercice individuel par les créanciers de certaines actions en justice. L’action des créanciers est en conséquence interdite, interrompue ou arrêtée (C. com. art. L 622-21, L 631-14, al. 1 et L 641-3, al. 1). Il existe également une obligation à la charge du débiteur, lorsque ce dernier est parti à un procès au moment où le jugement prononce l’ouverture d’une procédure collective, d’informer le créancier de cet événement. Si le débiteur encourt des sanctions s’il manque à cette obligation, même un tel manquement ne permet pas de contourner la règle selon laquelle les poursuites à l’encontre du débiteur sont suspendues.

La question a été soulevée devant la Cour de cassation de savoir si cette paralysie des procédures concernant la société débitrice pouvait également, dans certains cas profiter au dirigeant de cette société.

La Cour de cassation a déjà considéré en 1994 que cet arrêt des poursuites ne permettait pas de protéger le dirigeant de poursuites engagées par l’administration fiscale.

Dans une décision très récente cette problématique a fait à nouveau débat dans le cadre de poursuites initiées par l’administration des Douanes

La société concernée par cette affaire importait des boissons non alcoolisées qu'elle commercialisait en France. 
 
L’administration des Douanes a constaté que cette dernière n'acquittait pas les droits et contributions indirectes prévus pour ces marchandises par le code général des impôts. Un procès-verbal d'infraction a été notifié à la société et à son dirigeant. 
 
Un avis de mise en recouvrement a été délivré à la société puis au dirigeant. Ce dernier a attaqué l'administration des douanes en justice pour obtenir le dégrèvement du redressement. 

L’argument principal du dirigeant était de dire que qu’il n’existait qu’une seule créance douanière, que la créance contre la société et contre lui était la même, et que de ce fait l’ouverture de la liquidation judiciaire de la société interdisait qu’il soit poursuivi.

Dans ce cas pourtant, la Douane pouvait poursuivre le dirigeant, même si la société était en liquidation judiciaire, et même si la créance contre la société et le dirigeant était la même. En effet le dirigeant était poursuivi solidairement parce qu’il avait permis de commettre cette fraude. Le dirigeant ne pouvait donc bénéficier d’aucune suspension des poursuites. 

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(Cass. com. 21-6-1994 n° 1462 ; Cass. com. 6-6-2018 n° 16-23.996 ; Cass.com. 29 mars 2023, n°21-21.005) 

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